Un professionnel souhaitant exercer une activité indépendante seul a plusieurs options pour l’exercice de cette activité : 

  • Il peut tout d’abord créer une société unipersonnelle (SASU, SARLU, etc.) qui lui permettra de mettre en place une entité totalement distincte de son patrimoine personnel et ayant une personnalité juridique propre.

La création d’une société peut avoir des avantages fiscaux et permet également de faciliter la cession de l’activité professionnelle puisqu’il suffit alors de céder les titres de la société.

  • Il peut ensuite opter pour le statut d’entrepreneur individuel (statut également connu sous l’appellation « auto-entrepreneur » ou « auto-entreprise » lorsque l’entrepreneur a opté pour le régime simplifié permettant des obligations comptables et déclaratives allégées lorsque le chiffre d’affaires ne dépasse pas un certain montant) 

L’inconvénient de ce type d’exercice résidait jusqu’ici dans l’absence de séparation entre le patrimoine professionnel et le patrimoine personnel de l’entrepreneur.

En effet, les créanciers professionnels de l’entrepreneur avaient la possibilité de « s’attaquer » au patrimoine personnel de ce dernier, à l’exception de sa résidence principale, protégée légalement.

L’entrepreneur individuel pouvait, pour pallier cette difficulté, publier une déclaration d’insaisissabilité pour protéger ses bien personnels. Cependant cela supposait d’établir un acte notarié et de la publier, générant ainsi des frais supplémentaires.

  • L’indépendant pouvait également opter pour un statut intermédiaire, à savoir l’Entreprise Individuelle à Responsabilité Limitée (EIRL) qui permettait à l’entrepreneur de protéger son patrimoine personnel sans constituer de société́, en effectuant une déclaration d’affectation.

Cette déclaration devait dresser la liste des biens qu’il décidait d’affecter à l’exercice de son activité professionnelle et seuls ces biens pouvaient être saisis par ses créanciers professionnels. 

Ce statut n’a cependant pas connu un réel succès dès lors qu’il était soumis à un régime relativement contraignant : la tenue d’une comptabilité́ commerciale était obligatoire quel que soit le régime fiscal, les comptes annuels devaient être déposées annuellement au greffe du tribunal de commerce. 

La loi du 14 février 2022, en faveur de l’activité professionnelle indépendante, publiée au journal officiel le 15 février 2022, a supprimé ce statut de l’EIRL tout en améliorant considérablement la protection du patrimoine de l’entrepreneur individuel.

En effet, le nouvel article L526-22 du code de commerce opère désormais une distinction automatique entre le patrimoine professionnel et le patrimoine personnel de l’entrepreneur individuel. 

Seuls les éléments du patrimoine dits « utiles » à l’activité professionnel constitueront le patrimoine professionnel pouvant être saisis par les créanciers, sauf conventions contraires. 

Le code des procédures civiles d’exécution est également modifié en ce sens, puisque l’article L161-1 dudit code dispose que les créanciers professionnels ne pourront engager une procédure d’exécution qu’à l’encontre du patrimoine professionnel (sauf manœuvres frauduleuses ou d’inobservation grave et répétée des obligations fiscales ou sociales par l’entrepreneur).

D’un point de vue de la théorie juridique, la loi du 22 février 2022 met fin à la théorie de l’unicité du patrimoine selon laquelle chaque personne ne peut avoir qu’un seul patrimoine qui est le gage général des créanciers.

Il est désormais acquis qu’une personne peut avoir un patrimoine personnel et un patrimoine professionnel distincts, limitant ainsi le gage des créanciers.

Valentine Squillaci

Avocate associée

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